La fonction de DSI a beaucoup évolué ces dernières années pour s’enrichir et intégrer de plus en plus les métiers et leur transformation. Le DSI est aujourd’hui très impliqué dans les plans de développements des entreprises et la recherche de nouveaux leviers de croissance.
Par Jean-Pierre Scandella (Président du cabinet Arrowman Executive Search) et Philippe Rosé (Rédacteur en chef de Best Practices Digital & Business)
Plus les technologies s’intègrent dans les métiers du retail et de l’industrie, plus les DSI sont précieux dans l’organisation de l’entreprise. Après cette période de crise sanitaire si particulière, nous assistons sur le marché de l’emploi à l’ouverture de nombreux postes au fort contenu technologique mais aussi en management du changement.
Dans ce contexte où les start-up sont en compétition avec les ETI et les plus grands groupes pour intégrer leurs plateformes digitales dans leur processus, moderniser les systèmes existants et intégrer de plus en plus de technologies, le recrutement des DSI reste, pour les DRH et les directions générales, un vrai casse-tête.
On peut ainsi identifier plusieurs pièges dans lesquels il est très facile de tomber.
1. La trappe à compétences. La situation actuelle est quasiment inédite : les entreprises se trouvent entre deux effets générationnels. D’un côté, la génération des DSI les plus seniors, qui quittent leur poste, essentiellement pour prendre leur retraite. C’est la génération des quarantenaires dans les années 1990, qui ont pu satisfaire aux besoins des entreprises qui, à l’époque, se sont fortement informatisées et converties à Internet et au e-commerce. D’un autre côté, la relève ne semble pas totalement assurée en termes de compétences et d’expérience, notamment pour les moyennes et grandes entreprises. Il semble que nous soyons dans un trappe de compétences. Le piège consiste à croire qu’il sera facile de recruter un DSI et que toutes les compétences se valent, alors que les profils rares sont potentiellement les plus créateurs de valeur.
2. La transformation des attentes des candidats. La crise sanitaire est passée par là et les attentes des managers intègrent de plus en plus la qualité de vie, en particulier avec le télétravail, ou la modération de la charge de travail et, de moins en moins, le besoin d’« incentives » classiques, de type voiture de fonction. Le piège est de privilégier « l’ancien monde », sans anticiper cette évolution/individualisation des attentes.
3. La surenchère salariale. Le contexte de tension rejaillit inévitablement sur les rémunérations, poussées à la hausse. Le piège est de conserver une posture rigide basée sur des grilles de salaires de plus en plus déconnectées de la réalité du marché.
4. Le manque de visibilité sur les parcours. Il est de plus en plus difficile de juger de la vraie valeur d’un candidat, à la lecture de son CV : un excellent CV peut cacher des personnalités qui manquent cruellement de soft skills (intelligence émotionnelle, créativité, capacité de négociation, autonomie, capacité à résoudre des problèmes complexes…). C’est ce qui explique par exemple que des DSI ou d’autres managers continuent, malgré quelques expériences difficiles, à retrouver des postes alors qu’ils ont été poussés dehors. Heureusement, ils sont peu nombreux, mais peuvent occasionner de gros dégâts.
Comment éviter de tomber dans ces pièges ? Plusieurs approches sont pertinentes :
1. Individualiser votre approche car les grilles fonctionnent de moins en moins pour recruter des experts et des acteurs du change management. Comme pour les experts de la Data, de l’architecture et de l’IoT, privilégier les parcours à fort contenu qui ont connu des entreprises en croissance plutôt que les profils issus des plus grands groupes dont le design et les systèmes sont conçus ailleurs.
–> Eviter de proposer à un candidat nouveau ce qui a pu conduire à l’échec dans votre organisation précédente.
2. Valider et mettre en avant les compétences de management et la capacité d’intégration des technologies et des systèmes. Le DSI est un homme ou une femme orchestre même s’il (elle) a pu être spécialiste à une étape de son parcours. Sa capacité à piloter les projets et à faire grandir les experts fera toujours la différence sur le long terme. Cela demande une expérience d’au moins quinze ans pour avoir observé la globalité des SI.
–> Eviter de recruter des gourous inexpérimentés.
3. Valoriser les profils rares. Les candidats correspondant aux nombreuses offres du marché sont à valoriser si vous souhaitez réussir vos projets. Salaire en hausse, souplesse pour le télétravail ne seront pas suffisants pour attirer ces talents si convoités. Ayez bien conscience que la plupart de entreprises proposent déjà ces mêmes avantages. Il faut donc trouver des éléments différenciateurs et ne pas chercher à les convaincre uniquement d’être résilients et de faire avec les difficultés de l’entreprise. Un candidat DSI maîtrisant les nouvelles technologies et les plateformes digitales ne viendra pas seulement convaincre ses futurs collaborateurs de l’évolution nécessaire de l’entreprise, il ira plutôt là où il est en phase avec le CODIR et sa stratégie de développement.
–> Eviter les profils trop lisses et trop scolaires.
4. Ne tomber pas dans l’excès technologique. Bien sûr les technologies s’imposent partout comme les process et l’optimisation de la Data et de la Cybersécurité. La robotisation s’accélère dans l’industrie, mais vous recherchez avant tout une personnalité capable de comprendre votre histoire et vos valeurs. Les meilleurs candidats ne tombent pas dans le tout technologique et gardent une vision de la finalité humaine de leur travail. Ils ont, en outre, une capacité à délivrer les projets, jusqu’au bout, dans une logique de performance opérationnelle continue.
–> Fuir les candidats qui cherchent à impressionner par leurs connaissances techniques et qui ont du mal à vulgariser leur savoir lors d’un entretien. Ils ne seront pas plus clairs à l’avenir.