Beaucoup d’entreprises françaises ainsi que l’administration font appel à des cabinets de conseils anglo-saxons. Il est urgent de valoriser l’offre française dans ce domaine, écrivent les signataires de cette tribune.
La terrible crise que nous traversons avec la pandémie et ses tragiques conséquences sanitaires, mais aussi économiques et sociales, a déjà fait l’objet de nombreuses exégèses. Nous ne souhaitons pas en rajouter une, mais nous voudrions ici mettre en avant la nécessité future pour les grandes institutions publiques de notre pays de s’appuyer davantage sur les entreprises françaises, de les accompagner plus fortement encore.
L’obligation de reconquérir le terrain perdu dans de nombreux secteurs stratégiques et industriels (santé, agroalimentaire, logistique…) doit aujourd’hui être complétée par une réflexion plus globale sur l’environnement immédiat de nos entreprises (simplification, fiscalité, mais aussi conseils au sens large). C’est l’ensemble de la chaîne de valeur de notre économie qui doit être maîtrisée. Nous devons innover du conseil stratégique à la gestion de la performance en nous appuyant sur nos entreprises.
Force est de constater que beaucoup des 140.000 PME et des 5.000 ETI de notre pays, mais aussi la majorité de nos 274 grandes entreprises, comme ce qui semble encore plus étonnant, les grandes administrations, y compris pour gérer des questions de logistiques, privilégient souvent pour les accompagner et les conseiller les grandes entreprises anglo-saxonnes de ce secteur.
Solidarité et de patriotisme économique
Les entreprises et les administrations anglo-saxonnes ont en effet intégré très tôt le caractère transverse du conseil (juridique, fiscal, affaires publiques, recrutement…) et caracolent en tête de ce secteur si stratégique. Mieux que nous les Anglo-Saxons ont compris que pour se développer à l’international il fallait d’abord être solide dans son propre pays. Ils ont assimilé le fait que ces entreprises de conseil étaient des vecteurs de promotion économique des intérêts de leurs pays. Plus vite que nous, les Anglo-saxons ont simplement intégré dans leur ADN les principes de « solidarité et de patriotisme économique ».
La reconquête que chacun souhaite et qu’appellent de leurs voeux les pouvoirs publics ne peut faire l’impasse sur ce secteur. L’excellence française, du reste est présente, mais son offre émiettée, avec la pesanteur des habitudes, l’empêche d‘exprimer tout son potentiel.
Pour que la volonté de réindustrialiser le pays notamment dans la santé et les nouvelles technologies ne soit pas une énième déclaration sans stratégie ni fondement ou un simple thème politique, appuyons-nous sur les conseils, les talents et les réseaux de nos entrepreneurs. Cela passera par la confiance en nos propres ressources et en l’avenir.
Un partenariat global
Le thème de la sécurité sanitaire est devenu à juste titre dominant depuis mars 2020, plus largement les questions autour de l’indépendance et de notre sécurité nationale se prolongent maintenant au niveau de l’industrie mondiale des plateformes technologiques et des Gafa qui imposent leurs modèles d’applications, leurs standards et la gestion de nos données. Dans ce contexte il est aussi urgent de veiller à la gestion de nos données sensibles en nous appuyant sur des conseils et des entreprises françaises et européennes.
Ce sont les raisons pour lesquelles, les signataires de ce texte souhaitent mettre en place un partenariat global couvrant l’ensemble des secteurs de l’accompagnement de nos entreprises dans une stratégie de conquête à l’international et non de repli. Privilégier l’innovation dans des secteurs à reconquérir en conseillant les entreprises dans l’optimisation de l’usage des nouvelles technologies, la maîtrise de leurs données et la conquête des nouveaux secteurs.
L’ensemble des décideurs publics ou privés doit enfin prendre conscience que le « produire français » pour louable qu’il soit, doit s’accompagner d’un « conseiller français » maîtrisant les nouveaux enjeux stratégiques et l’apport des technologies pour ne pas rester un voeu pieux.
Les signataires : Hervé Novelli est ancien ministre ; Jean-Pierre Scandella est président d’Arrowman Executive Search ; Paul Boury est président de Boury, Tallon & Associés ; Marc Pierre Stehlin et Anna-Christina Chaves, associés de Stehlin & Associés ; Pierre Breesé est président d’IP TRUST.